Le prix Nobel de la paix, le Docteur Denis Mukwege a, dans un long message rendu public ce mercredi 10 juin, annoncé sa démission comme Vice‐Président du Comité multi-sectoriel de riposte au Coronavirus dans la province la province du Sud-kivu.
Ce dernier était à la tête de la commission santé de cette équipe.
Il évoque plusieurs raisons notamment le retard dans le traitement de échantillons envoyés à l’INRB Kinshasa.
Voici l’intégralité de son message :
« Le 30 mars 2020, j’ai été nommé, par le Gouverneur de la province Sud-Kivu, Vice-Président de la Commission multi-sectorielle et président de la Commission Santé mises en place pour la riposte contre la pandémie de Covid-19 dans la province du Sud-Kivu.
Après trois mois de travail, avec l’appui d’experts locaux nationaux et internationaux, nous avons mis sur pied une stratégie de riposte que nous avons expliquée lors d’une conférence de presse le 11 avril 2020. Des actions de prévention et de prise en charge des malades, réalisées selon cette stratégie, ont permis de contenir la diffusion du Coronavirus dans la Province pendant plusieurs semaines.
Deux difficultés majeures nous ont empêchés d’appliquer efficacement notre stratégie :
D’une part, l’impossibilité de disposer dans notre province de RT‐PCR permettant de confirmer rapidement le diagnostic des Covid+. Le délai requis, de plus de deux semaines, pour recevoir les résultats des prélèvements envoyés à l’INRB à Kinshasa, a constitué un handicap majeur pour notre stratégie basée sur « tester, identifier, isoler et traiter ».
D’autre part, un relâchement des mesures de prévention par notre population, un déni des réalités, l’impossibilité de faire respecter les mesures barrières, la porosité de nos frontières avec le retour massif de milliers de compatriotes venant de pays voisins sans avoir été mis en quarantaine, ont diminué l’efficacité de notre stratégie.
A ces deux facteurs s’ajoutent des faiblesses organisationnelles et de cohérence entre les différentes équipes responsables de la riposte à la pandémie dans le Sud-Kivu.
A ce jour, au vu de l’afflux de malades affectés par le Coronavirus dans les hôpitaux de Bukavu, il semble indubitable que la maladie est présente dans la ville. Nous sommes donc au début d’une courbe exponentielle épidémiologique et nous ne pouvons plus appliquer une stratégie qui serait uniquement préventive.
J’ai donc décidé de démissionner de mes fonctions de Vice‐Président du Comité multi-sectoriel de riposte au Coronavirus dans notre province et de Président de la Commission Santé, afin de me consacrer entièrement à mes responsabilités médicales et de soigner cet afflux de malades à l’Hôpital de Panzi.
Concernant la continuité de notre action, je suis persuadé que S.E Monsieur le Ministre de la Santé et la Division Provinciale de la Santé seront à même d’assurer la mise en oeuvre des stratégies initiées ensemble.
Je continuerai à apporter ma contribution intellectuelle dans la lutte contre la pandémie de Coronavirus dans notre province.
Dans cette épreuve pour notre population et pour nous tous, je serai toujours aux côtés de la population et du Gouverneur de la Province” conclut le prix Nobel de la paix 2018.